La directive européenne sur la transparence salariale (UE 2023/970), adoptée définitivement le 10 mai 2023 et publiée au Journal officiel de l’Union européenne le 17 mai, s’inscrit dans la stratégie globale de l’UE pour parvenir à « l’égalité de rémunération pour un travail de même valeur » entre femmes et hommes. Malgré des cadres législatifs existants, l’écart de salaire moyen entre les sexes persiste partout en Europe, estimé à environ 13% en moyenne, et parfois bien plus selon les secteurs ou les statuts.
Cette directive vise à instaurer une nouvelle culture de la transparence et de l’équité salariale au sein de tous les États membres de l’Union, en imposant des obligations précises et étendues aux employeurs privés et publics.
Les principaux objectifs sont :
- Combattre les discriminations : En garantissant à chaque candidat et collaborateur l’accès à l’information salariale, la directive veut éliminer les écarts basés sur le sexe, souvent dus
à des biais dans les recrutements, les promotions ou la négociation salariale. - Mettre fin à la « négociation à l’aveugle » : Jusqu’à présent, nombre de salariés ignoraient à combien s’élevait la rémunération pour un poste équivalent au leur, ce qui pouvait perpétuer des inégalités historiques. Désormais, l’employeur devra afficher la fourchette de rémunération dès l’offre d’emploi et répondre aux demandes d’informations sur les salaires versés à des personnes de même catégorie.
- Transparence dès l’embauche : Il devient interdit de demander à un candidat son niveau de salaire antérieur, ce qui permet de ne pas reproduire mécaniquement des inégalités passées. Les salaires proposés doivent être fondés sur des critères objectifs, directement liés au poste et indépendants du sexe du candidat.
- Droit individuel à l’information : Chaque salarié peut demander, une fois par an, la communication du salaire moyen des personnes de même catégorie, ventilé par genre, ainsi que les critères d’évolution salariale et professionnelle. Cela encourage la mobilisation collective et le dialogue social au sein des équipes.
Un reporting obligatoire est prévu :
- Pour les entreprises de plus de 250 salariés, la publication annuelle d’indicateurs sur les écarts de rémunération et l’accès aux promotions est obligatoire.
- Les structures comptant 100 à 249 salariés devront transmettre ces données tous les trois ans.
- Une attention particulière est portée à la notion de « catégories d’emplois de valeur égale », qui doit être définie de manière transparente et non-discriminante.
- Mesures correctives : Dès que l’écart salarial excède 5% sans justification objective, l’employeur devra engager des mesures correctrices rapidement. Les instances représentatives du personnel seront associées à ce processus, ce qui donne au dialogue social un rôle central.
- Sanctions et renversement de la charge de la preuve : En cas de litige, l’employeur devra prouver que la différence de traitement n’est pas liée au genre. Des sanctions financières ou administratives sont prévues si l’obligation de transparence ou de correction n’est pas respectée.
Le calendrier de mise en œuvre :
Les États membres doivent transposer la directive avant le 7 juin 2026. Les entreprises devront adapter progressivement leurs process et outils RH pour répondre à ces nouvelles exigences, sous le contrôle d’autorités nationales.
La CFTC salue cette directive, qu’elle considère beaucoup plus complète et exigeante que l’actuel index de l’égalité professionnelle.
Pour nous, la directive européenne sur la transparence salariale constitue une opportunité de rééquilibrage du marché du travail et de promotion de l’égalité réelle. Nous espérons une transposition ambitieuse en droit français, intégrant une concertation approfondie avec les syndicats pour garantir l’efficacité du dispositif et les droits des salariés.
Ce texte est donc une étape importante, qu’il faut accompagner de mesures concrètes et d’un dialogue social renforcé, afin de transformer durablement les modes de rémunération dans l’entreprise et offrir à chacun, sans distinction de genre, la juste reconnaissance de son travail.